Pendant un an, j'ai travaillé en hôpital de jour dans le service de rhumatologie de la Pitié Salpêtrière. Chaque jour, des personnes consultent dans ce service pour mieux comprendre leurs douleurs et orienter leur traitement. Est-ce une pathologie rhumatismale inflammatoire, ou bien autre chose ?

Pour ces personnes, les douleurs lombaires sont parfois la plainte principale. Elles sont envoyées par leur médecin traitant ou leur rhumatologue, bien souvent avec une suspicion de spondylarthrite à l'esprit. Une batterie de consultations et d'imageries médicales permet souvent d'y voir plus clair.

Dans cet article, nous décrivons trois différences entre une lombalgie chronique commune (mal de dos chronique sans pathologie précise identifiée) et une spondylarthrite ankylosante. À la fin de cet article, vous saurez tout ce qu'il faut savoir sur le sujet.

Il existait un site web lié à la campagne de sensibilisation "Ne lui tournez pas le dos"  soutenue par l'AFLAR. Hélas, il semble désactivé à ce jour, ce qui m'a motivé à écrire cet article !

Qu'est-ce qu'une spondylarthrite ankylosante (SpA) ?

La spondylarthrite ankylosante est une maladie rhumatismale inflammatoire auto-immune, au même titre de la polyarthrite rhumatoïde ou le rhumatisme psoriasique. 

La SpA appartient au sous-groupe des spondyloarthrites, dont la caractéristique commune est une inflammation chronique des articulations de la colonne vertébrale.

En réalité, tous les termes cités précédemment forment une grande famille de syndromes dont les limites sont parfois floues. La spondylarthrite ankylosante est simplement l'une des formes qui a été la plus étudiée. 

C'est pour cela que j'utiliserai les termes de SpA, de spondylarthrite ou même de mal de dos inflammatoire de façon plus ou moins interchangeable. Autant réaliser un dépistage sur les différentes formes de cette pathologie !

"La maladie se déclare souvent chez les jeunes adultes, entre 16 et 30 ans. Elle toucherait 150 000 à 200 000 personnes* en France, dont près de la moitié souffre de formes sévères." (fiche de l'INSERM) L'apparition est progressive. 

*Ce qui représente un pourcentage très faible de la population, rappelons le ! Je ne veux effrayer personne ici. 🙂

La cause exacte de cette pathologie n'est pas entièrement comprise à ce jour. L'apparition de la maladie semble liée à un terrain génétique prédisposant et à d'autres facteurs qui restent à identifier.

Horaire mécanique ou inflammatoire, quand la douleur se comporte différemment

Entre une lombalgie commune (le mal de dos "classique") et une SpA, la douleur ne se comporte pas de la même manière. Ce que je vais présenter ici correspond aux signes les plus typiques. En pratique, les choses ne sont pas toujours aussi claires.

Mal de dos soulagé par le mouvement et aggravé par l'immobilité ?

Pour beaucoup d'entre vous, les douleurs sont soulagées par le repos et sont augmentées par les mouvements et les efforts. Dans le cas d'un mal de dos inflammatoire, on observe souvent l'inverse : rester immobile augmente la douleur et la raideur, et vous vous sentez mieux tant que vous bougez.

Mal de dos plus intense le matin et raideur matinale importante

Les matinées sont également différentes. Typiquement, le mal de dos inflammatoire est très prononcé le matin, avec une raideur importante de la colonne vertébrale (et peut-être d'autres articulations) pendant plus de 30 minutes. 

Beaucoup de personnes me disent qu'en se levant le matin, elles marchent comme une personne âgée. Si cela est bien sûr désagréable, ce n'est pas un déverrouillage matinal "inflammatoire" si cela dure 15 minutes. J'insiste sur le fait que nous parlons ici de raideurs qui durent longtemps, parfois des heures avant de se sentir plus souple.

Mal de dos qui réveille la nuit

Enfin, les douleurs inflammatoires ont tendance à se majorer dans la deuxième partie de la nuit. Vous êtes alors réveillés vers 2 ou 3 heures du matin par des douleurs sourdes, lancinantes. Impossible de trouver une position confortable !

La nuance ici est que nous ne parlons pas des douleurs aux changements de position. Si vous êtes réveillés la nuit parce que vous bougez et que cela vous fait mal, cela correspond plutôt à une lombalgie commune.

Présence d'autres articulations douloureuses

Il existe des formes de spondylarthrites axiales (atteinte du rachis) et/ou périphériques (atteinte des membres). On peut donc retrouver des symptômes au niveau des bras et des jambes.

En effet, ces pathologies peuvent s'exprimer par une inflammation des articulations périphériques (épaule, poignet, cheville...) et/ou par une inflammation des zones d'insertion des ligaments et des tendons. (réf)

Quelles peuvent être ces autres articulations atteintes ?

En pratique, vous pouvez ressentir des douleurs au niveau des coudes, des genoux, des talons; etc. Les zones touchées peuvent changer au fil des crises . 

Encore une fois, cela peut être très différent d'une personne à une autre. J'ai connu des patients dont les articulations douloureuses restaient toujours les mêmes. J'en ai connu d'autres dont l'articulation douloureuse changeait à chaque crise.

Est-ce que j'ai forcément une spondylarthrite si j'ai d'autres articulations douloureuses ?

Je veux insister sur le fait qu'avoir d'autres articulations douloureuses n'est pas spécifique de la spondylarthrite. C'est-à-dire que vous pouvez avoir plusieurs articulations douloureuses sans avoir cette maladie.

D'une façon générale, les personnes qui souffrent de lombalgie chronique ont tendance à avoir au moins une autre partie du corps douloureuse (réf). Ce serait donc la règle plutôt que l'exception !

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Présence d'autres symptômes particuliers en parallèle de la douleur

Le saviez-vous ? Les spondylarthrites sont souvent accompagnées d'autres symptômes n'ayant rien à voir avec les articulations (réf). Les professionnels de santé recherchent normalement ces détails lors de leurs consultations. 

Hélas, ces questions (parmi les autres questions de dépistage) passent parfois à la trappe, à cause d'un manque de temps ou de sensibilisation. Je vous invite dans tous les cas à en faire part à votre médecin si vous êtes concerné(e).

  • Des rougeurs au niveau d'un œil, accompagnées de douleurs, d'une vision trouble, d'un larmoiement et d'une aversion à la lumière. Les médecins recherchent ici ce qu'on appelle une uvéite antérieure aigüe.
  • Des problèmes intestinaux, souvent caractérisés par des douleurs au ventre, des diarrhées (avec parfois présence de sang) et éventuellement une atteinte de la zone anale. Ces symptômes peuvent évoluer par crises. Ils sont importants à mentionner au médecin pour évaluer la possibilité d'une maladie inflammatoire chronique de l'intestin.
  • Du psoriasis, c'est-à-dire des plaques rouges sur la peau pouvant être présentes sur n'importe quelle partie du corps, de façon plus ou moins étendues. Les plaques rouges apparaissent par poussées et desquament (elle pèlent). (voir la fiche Ameli)
  • D'autres problèmes de santé peuvent être associés à une spondylarthrite : ostéoporose, problèmes cardiaques, pulmonaires et rénaux...
  • Les signes d'alertes classiques comme la fièvre et une perte de poids inexpliquée restent à signaler, bien entendu.

Résumé : avez-vous retenu toutes les différences ?

Rassurez vous, ce n'est pas une interrogation surprise ! Voilà une image qui reprend les différents points abordés.

Infographie reprenant les différences entre mal de dos commun et spondylarthrite : déverrouillage matinal, réveils nocturnes, etc.

Que faire si je me reconnais dans cet article ?

Si un ou plusieurs symptômes décrits dans l'article vous correspond, discutez en avec votre médecin. Il est impossible de poser un diagnostic simplement en lisant un article : il faut évaluer votre situation dans son ensemble. 

En hôpital de jour, il arrive régulièrement que des personnes souffrent de douleurs lombaires d'horaire inflammatoire, sans pour autant qu'il ne s'agisse d'une spondylarthrite.  

Votre médecin pourra vous orienter vers un spécialiste et/ou des examens complémentaires s'il le juge nécessaire. La piste d'une spondylarthrite sera alors soit écartée, ce qui est rassurant pour vous, soit confirmée, ce qui ouvre la voie à des traitements efficaces.

Quelles associations puis-je contacter si je suis concerné ?

Parmi les associations qui peuvent vous aider, on retrouve notamment :

AFLAR - Association Française de Lutte Antirhumatismale

AFS – Association France Spondyloarthrites

Pour conclure, je tiens à rappeler que l'activité physique reste l'un des moyens privilégiés en cas de mal de dos, même en cas de rhumatisme inflammatoire ! Parlez en avec votre kiné, cette fois-ci. 😉


2 commentaires

Bogey · 22 juin 2023 à 5:50 pm

J’ai eu un lupus et j’avais les mêmes symptômes que ceux énumérés
Mon lupus a disparu d’après ma rumato suite à mea dernière prise de sang et j’ai toujours des douleurs inflammatoires et articulaires et musculaires qui se déclenchent à divers endroits
Ma rumato me dit que j’ai de l arthrose

    Eric Bouthier · 22 juin 2023 à 6:01 pm

    Effectivement le lupus fait partie des pathologies auto-immunes, comme la SpA. Est-ce que vous avez bénéficié de rééducation, en plus du traitement médicamenteux ?

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