Les idées reçues sur le mal de dos sont légion. Dans cet article, vous n'allez pas seulement (re)découvrir 31 mythes qui existent au sujet des douleurs lombaires. Nous allons également évaluer leurs conséquences sur vous et vos douleurs. 

Si je prends du temps pour en parler, ce n'est pas pour critiquer et pointer du doigt celles et ceux qui diffusent ces idées. Je souhaite en parler encore une fois car les conséquences de ces mythes peuvent être terribles. En tant que kinésithérapeute, je les observe avec tristesse tous les jours, sans exception. Tous mes confrères savent de quoi je parle.

Toutes les idées reçues sont classées en quatre catégories en fonction du "danger" qu'elles peuvent représenter. Rien de scientifique là-dedans, il ne s'agit que de mon ressenti personnel.

Mention spéciale aux remèdes étonnants pour la sciatique à base d'ail, qui ne risquent pas vraiment de poser problème (mais vous puerez des pieds).

Les idées reçues "anecdotiques" sur le mal de dos

1) Les exercices pour le mal de dos doivent être exécutés parfaitement

Lorsque je demande à des patients ce qui compte le plus lorsqu'il est question d'exercices pour le dos, la même réponse revient quasi systématiquement. Il faudrait les faire de la "bonne manière", et le kinésithérapeute serait là pour corriger les erreurs.

Si cette idée paraît sensée, elle n'est pas toujours vraie. Beaucoup d'exercices peuvent être faits de différentes manières. La majorité d'entre eux sont inoffensifs, même sans respecter les consignes habituelles. Bien entendu, vous pourriez ressentir de la douleur, mais vous ne vous mettriez pas en danger.

L'une des conséquences que je constate est que de nombreuses personnes hésitent à faire leurs exercices, de peur de mal les faire. Résultat : ils les font de façon très irrégulière. L'approche ne porte pas ses fruits, et les exercices sont jugés inefficaces.

Femme qui coach un homme sur une machine de Pilates, une approche qui contient des idées reçues sur le mal de dos

2) Les exercices pour le mal de dos doivent être sélectionnés avec précision

Le choix des exercices fait l'objet de vifs débats entre les professionnels. Certains préfèrent cibler des muscles en particulier. D'autres préfèrent se baser plus globalement sur le mouvement, sur la ressemblance avec vos activités quotidiennes ou encore sur ce que vous ressentez pendant le mouvement.

Aujourd'hui, on ne sait pas vraiment ce qui est efficace dans les exercices (voir cette revue systématique). Les différents types d'exercices partagent une efficacité similaire. Aucun exercice ne peut se targuer d'être "le meilleur" pour le mal de dos (n'en déplaise à plusieurs Youtubeurs et Instagrammers).

Personnellement, je conseille d'accorder plus d'attention aux choses suivantes : savoir doser et faire progresser ses exercices au fil du temps, connaître des mouvements que l'on apprécie, reprendre confiance sur des mouvements de plus en plus exigeants, faire un geste de différentes façons, et d'autres encore.

3) Les talons hauts sont interdits

Voilà une première idée reçue en lien avec la posture ! Les talons ont souvent été pointés du doigt comme une cause de mal de dos. Les hauts talons font adopter une posture différente, et c'est tout à fait normal (autrement.. vous tombez !).

En revanche, il n'y a pas de raison de les interdire. S'ils deviennent difficiles à porter car vous avez mal au dos au bout d'une heure, vous pouvez certainement trouver des solutions.

4) Il ne faut pas croiser les jambes car cela vrille le bassin

Pour les fous de posture, tout ce qui dévie d'une posture "droite" est accusé d'être une cause de douleur. Cette position n'y échappe pas ! Vous avez peut-être déjà entendu dire que croiser les jambes peut vriller votre bassin et affecter votre dos ?

En réalité, c'est sous-estimer largement la solidité du corps humain ! Heureusement, votre corps peut tout à fait adopter une telle posture puis en ressortir sans "séquelle" au niveau du dos. Autrement, nous serions constamment déformés par toutes les forces qui nous traversent.

Il est bien plus pertinent d'alterner entre différentes positions assises, sans se soucier des "bonnes" et des "mauvaises" postures. Si la position assise jambes croisées est agréable pour vous, alors faites-vous plaisir.

5) Il faut porter des semelles orthopédiques pour corriger la position des pieds

Décidément, voilà une troisième idée reçue à la suite sur la posture. Les pieds plats et les pieds creux ont tous les deux été accusés d'être responsables de maux de dos. Par conséquent, il est logique que des professionnels tentent d'agir sur les pieds.

Est-ce que les semelles orthopédiques sont efficaces sur les douleurs lombaires ? Rien n'est moins sûr. À ce jour, nous n'en savons pas assez pour recommander des semelles orthopédiques en cas de lombalgie.

Pour en savoir plus, vous pouvez lire cet article Semelles orthopédiques pour le mal de dos : optionnelles ou essentielles ?

6) Chaque étage vertébral correspond à un problème psychosomatique particulier

T4, la peur de ne pas être aimé, L1, le sentiment d'insécurité,... Chaque étage de la colonne vertébrale a été étiqueté avec quelque chose de suffisamment vague pour qu'on puisse s'y reconnaître.

Je vais volontairement aller vite sur ce point : tout cela n'est basé sur rien. Vous risquez surtout de perdre du temps. Néanmoins, des problèmes personnels peuvent tout à fait participer à la douleur.

7) Il faut faire des exercices tous les jours et à vie

Certaines approches peuvent donner l'impression d'être des sentences à vie. "Vous devrez faire ces dix exercices tous les jours pour ne pas avoir mal au dos". Avez-vous cette idée en tête ? Si cela peut être rassurant pour certains, cela peut carrément devenir une prison pour d'autres.

D'un côté, une dose régulière d'activité physique est importante pour une bonne santé physique et mentale. Contraignant ? Oui, sans doute, tout comme d'autres choses que nous faisons quotidiennement pour notre bien. Se brosser les dents par exemple !

De l'autre côté, les exercices ne sont qu'une option parmi d'autres pour se procurer cette dose d'activité physique. Le simple terme "exercices" recoupe déjà une multitude de possibilités différentes.

En rééducation, les exercices sont souvent utilisés dans l'objectif de vous permettre de refaire d'autres activités, parfois plus intéressantes pour vous.

8) Il faut renforcer les muscles profonds qui soutiennent le dos, c'est ça le secret !

Certaines approches de rééducation sont basées sur l'activation et le renforcement des muscles profonds de la région lombaire. Il s'agit surtout du multifide et du transverse de l'abdomen. Ce travail est censé faciliter l'activation de ces muscles lors des mouvements qui nécessitent de stabiliser la colonne lombaire.

Ce type d'exercices semble aussi efficace que les autres (exercice général, renforcement musculaire, Mckenzie, etc), mais pas plus ! (réf)

De même, l'amélioration de la douleur et des capacités physiques après un programme de renforcement des muscles profonds ne semble pas expliquée par une meilleure performance de ces mêmes muscles. (réf)

D'autres facteurs sont en jeu : habituation du corps au mouvement, reprise de confiance, sécrétion d'endorphines, détournement d'attention, etc. Vous pouvez tout à fait choisir ces exercices s'ils vous plaisent et/ou pour le défi qu'ils représentent si vous ne ressentez plus grand chose dans le bas du dos...

Les idées reçues "gênantes" sur le mal de dos

9) Les sports à impacts sont interdits

Il est tout à fait normal d'avoir peur de recommencer certains sports. Si vos sports préférés sont assez mouvementés, cela peut vite devenir une source de frustration. Au delà de la peur, de fausses idées circulent sur les sports à impacts, comme la course à pied.

Vous avez sans doute déjà entendu que la course à pied "tasse" le dos, à cause des impacts ? Est-ce vrai ? Perdu... Plusieurs études se sont penchées sur le sujet. Les personnes qui courent régulièrement ont même tendance à avoir des disques intervertébraux en meilleure santé.

Vous aimeriez reprendre un sport à impacts, mais vous ne savez pas comment faire ? Les articles Ce que vous devriez savoir avant de reprendre une activité physique et 4 approches pour reprendre votre activité sportive préférée peuvent vous aider à y voir plus clair.

10) Il vous faut des abdominaux en béton pour avoir moins mal

Un grand classique ! Cette idée peut même se généraliser comme ceci : "Plus vous serez musclé, moins vous aurez mal". Honnêtement, j'aimerais bien que cette idée soit vraie, car cela nous simplifierait beaucoup la tâche.

Comme dit plus haut : oui, l'activité physique est bénéfique. Néanmoins, les raisons pour lesquelles vous la pratiquez sont importantes. Pourquoi ?

Focaliser ses efforts sur le renforcement musculaire des abdominaux (ou même du dos) pourrait vous éloigner d'autres types d'exercices plus utiles ou plus amusants.

Cela peut vous donner le sentiment que votre corps est actuellement fragile. Le discours employé implique souvent qu'il faudrait davantage de musculature pour "stabiliser" ou "protéger" le dos. Pourtant, votre dos est déjà solide. De plus, la force et l'endurance de votre dos ne semble pas prédire la survenue de futures lombalgies !

Image de massage du dos, potentiellement basée sur l'idée reçue des "nœuds musculaires"

11) Si vous vous sentez tendu, il faut masser et encore masser pour dénouer les muscles

Accrochez vos ceintures, celle-ci est particulièrement tordue.

Je suis certain qu'une bonne partie d'entre vous se sent tendu dans au moins une partie du corps. S'agit-il du bas du dos, des trapèzes ou encore d'une autre zone ? Certains parlent de tensions, de nœuds ou de contractures… Au début de ma carrière, je disais régulièrement à des patients que leurs muscles étaient contracturés et je m'évertuais à essayer de les détendre.

Le réflexe habituel de masser la zone. Au fil du temps, force est de constater qu'un florilège d'outils de massage a vu le jour (foam roller, balles, theragun, etc). Il faut dire que le massage a la réputation d'être agréable.

Seulement, il y a un hic. Plusieurs, même. Le massage possède un effet antalgique au court terme, grâce à la sécrétion d'endorphines et autres hormones anti-douleurs. Vous devrez alors masser très régulièrement pour conserver un semblant d'efficacité, sans réellement corriger le problème.

Par ailleurs, le massage ne semble pas agir de la façon dont nous l'imaginons. Pétrir un muscle ne semble pas agir dessus mécaniquement. On ne "défait" par le nœud avec nos mains comme on démêlerait les fils de nos écouteurs.

Il me faudrait un article entier pour vous expliquer comment un massage peut vous faire vous sentir plus détendu, alors que la tension des muscles n'a pas changé.

12) Si vous avez encore mal au dos deux mois après un lumbago, ce n'est pas normal !

Vous l'avez déjà entendu mille fois : un lumbago dure en moyenne 4 à 6 semaines. Que se passe-t-il si j'ai encore mal au bout de deux mois ? Est-ce inquiétant ? En réalité, ce délai de 4 à 6 semaines mérite d'être nuancé.

Contrairement à ce que pourrait vous dire votre voisin, ce n'est pas le signe que vous avez "vraiment abîmé quelque chose" ! Une consultation avec un professionnel de santé averti pourrait simplement être indiquée, pour vérifier qu'il n'y a pas d'obstacle particulier à votre guérison. 

Tout ce que vous devez savoir sur le délai de guérison d'un lumbago se trouve dans cet article : Combien de temps dure réellement un lumbago ?

13) Il ne faut reprendre le sport qu'une fois que la douleur a disparu

Avez-vous déjà demandé à votre médecin à partir de quand vous pouvez faire du sport ? Vous avez peut-être obtenu la réponse suivante : "Dès que vous n'avez plus mal".

Vous attendez alors avec impatience la disparition de la douleur pour pratiquer à nouveau votre sport préféré. Puis vous attendez. Encore et encore.

Le retour aux activités sportives fait parfois partie de la solution pour ne plus avoir mal. Si l'on attend de ne plus rien ressentir dans son dos, on risque d'attendre un très long moment, malheureusement.

Une bonne méthode et un accompagnement peuvent être nécessaires pour vous aider à refaire du sport. Surtout quand il reste de l'appréhension, voire lorsque vous vous êtes fait mal pendant le sport en question !

Des exemples d'outils sont expliqués dans cet article : 4 approches pour reprendre son activité physique préférée

14) Pour faire l'amour en ayant mal au dos, il n'y a que la cuillère ou l'étoile de mer

Combien d'entre vous ont entendu que la position de la cuillère (sur le côté) était la meilleure solution en cas de douleurs lombaires ? En réalité, cela dépend de beaucoup de choses, dont le type de mouvement que vous préférez.

Pour savoir comment choisir une position en fonction de votre type de douleur, voilà un article à ce sujet : Mal de dos et sexe 5 positions en fonction du type de douleur.

15) Le traitement kiné du mal de dos c'est de la chaleur, des électrodes et du massage.

Lorsque je demande à un patient en quoi consistait ses dernières séances de kiné, je me tends de façon imperceptible. Je sais qu'on risque de me répondre "c'était surtout des massages, des électrodes et deux trois étirements sur table". 

Quel est le souci avec ce type de séances ? Ce n'est pas le type de rééducation qui a le plus de chances de vous aider, notamment au long terme. L'application de chaleur, le massage et les électrodes ont en commun de procurer un soulagement au court terme. Résumer la kinésithérapie à cela est une gigantesque idée reçue sur ce métier.

Pour davantage de progrès, je conseille toujours une rééducation ACTIVE, c'est-à-dire avec des mouvements, des choses que vous faites vous-même et des stratégies pour atteindre vos objectifs (pouvoir aller se balader au centre commercial, pouvoir ranger sa maison, pouvoir rejouer au tennis, etc).

16) En cas de douleur chronique, il faut essayer tout ce qui existe pour augmenter ses chances de guérir

Souffrir de douleurs chroniques, qu'elles se situent au dos, à l'épaule ou au pied, devient un enfer pour beaucoup d'entre vous. Vous seriez prêts à tout pour vous débarrasser de ces douleurs. Il arrive que des personnes m'avouent à demi-mot avoir consulté un magnétiseur lorsqu'elles étaient au fond du trou.

La quantité de thérapies et de techniques proposées pour soulager la douleur est simplement astronomique. De nombreuses approches sont apparues au fil des années, notamment au sein des thérapies alternatives. Une bénédiction pour ceux qui cherchent enfin une solution ? Pas forcément...

La majeure partie de ces thérapies n'a pas d'efficacité au delà de l'effet placebo. Essayer ces thérapies l'une après l'autre a peu de chances de faire évoluer votre situation.

L'effet pervers est le suivant : chaque "échec" peut diminuer votre espoir, vos attentes, et la chance qu'un traitement soit efficace. Tout est décrit ici : 6 effets secondaires méconnus des thérapies alternatives sur le mal de dos.

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Les idées reçues "obstacles" sur le mal de dos

17) Si on a déjà essayé les médicaments et la rééducation, il ne reste plus que les thérapies alternatives pour nous sauver

Un traitement qui échoue est toujours un moment de déception, de frustration et parfois même de peur pour l'avenir. Lorsque les traitements "conventionnels" (médicaments, rééducation, infiltrations, chirurgie) ne semblent pas vous aider, il est tentant d'essayer des thérapies alternatives.

Hélas, la majorité des thérapies alternatives a peu de chance de vous aider au delà d'un soulagement de court terme. Essayer un maximum d'entre elles risque de multiplier le nombre d'échecs et de vous décourager.

Bien qu'il n'existe pas de solution idéale, je conseille d'examiner soigneusement la rééducation dont vous avez bénéficié jusqu'à présent. Était-elle optimale ?

18) Vous avez mal au dos parce que vous êtes trop cambré(e)

Les personnes particulièrement cambrées dans le bas du dos l'ont sans doute déjà entendu. En termes médicaux, on appelle cela une hyperlordose lombaire. Est-ce que cela peut participer à des douleurs lombaires ? Oui, dans certains cas. Est-ce qu'il faut changer cette courbure pour résoudre le problème ? Non. 

Dans la grande majorité des cas, vous avez toujours eu cette morphologie depuis au moins votre adolescence. Si la douleur est apparue il y a cinq ans, pourquoi blâmer la forme de votre dos ? Les études scientifiques ne parviennent pas à retrouver un lien entre une hyperlordose lombaire et le risque d'avoir mal au dos.

19) Il faut trouver LA cause de vos douleurs lombaires chroniques pour vous en sortir

Oui, certaines douleurs chroniques ont une cause particulière. Pour certaines, il existe des traitements particuliers. Les personnes porteuses d'une polyarthrite rhumatoïde ou d'une spondylarthropathie, que je vois quotidiennement, approuvent. Voilà pourquoi il restera toujours important d'avoir consulté des médecins pour diagnostiquer ou écarter certains syndromes.

Néanmoins, un piège se cache ici, prêt à attraper votre cheville et à vous ralentir dans votre progression. Que se passe-t-il lorsque votre lombalgie chronique n'a pas de cause précise, et que vous en cherchez absolument une ?

Beaucoup de personnes dans cette situation sont terrifiées par le fait de ne pas savoir.  Vous risqueriez de consulter de plus en plus de médecins. Vous seriez absorbés par la recherche du problème, là où vous pourriez rechercher des solutions.

Pire encore, un thérapeute trop confiant pourrait affirmer avoir trouvé LA cause et LE traitement, et vous embrigaderait dans une thérapie douteuse.

Que faire à la place ? Idéalement, comprendre les différents facteurs qui influencent vos douleurs, et trouver des façons de travailler dessus.

Photo de labyrinthe végétal, métaphore de la complexité du mal de dos, y compris à cause des idées reçues sur le mal de dos

20) Votre mal de dos est dû à une vertèbre déplacée ou à un bassin décalé

Un autre classique. Les formations initiales en kinésithérapie et en ostéopathie évoluent au fil du temps, dans la bonne direction. Hélas il reste encore une flopée de thérapeutes qui continuent de propager des idées dépassées. Ici, il ne s'agit pas d'un débat d'idées, mais d'un constat simple. Le concept de "vertèbre déplacée" n'est tout bonnement pas valide.

Si quelqu'un vous "diagnostique" une vertèbre déplacée, mon conseil est clair : allez-voir ailleurs. Pour en savoir plus : L'arnaque du bassin décalé (et de l'entorse de cheville mal soignée)

21) L'IRM est une boule de cristal qui trouve la source de la douleur

Vouloir trouver la source des douleurs est parfaitement compréhensible. Lorsqu'on ne comprend pas ce qui nous fait mal, cela peut devenir très angoissant au quotidien. L'IRM étant l'un des examens les plus précis dont nous disposons, il paraît logique d'y recourir pour enfin mettre sur le doigt sur la cause !

Hélas, ce n'est pas aussi simple. Beaucoup de lombalgies persistantes ne sont pas en lien avec un problème au niveau d'une structure donnée (comme un muscle, un ligament, un disque,...). Vous pourriez tout à fait recevoir un compte-rendu clair comme de l'eau de roche : le fameux "examen sans particularité". (voir Mon IRM est normale : pourquoi j'ai mal ?)

Un résultat d'IRM peut aussi vous piéger d'une autre façon. L'examen est tellement minutieux qu'il détecte beaucoup, beaucoup de choses. Il arrive de repérer des discopathies dégénératives qui ne sont pas responsables des douleurs.

De telles modifications existent aussi chez des personnes qui n'ont pas mal au dos. L'IRM, loin d'être inutile, permet peu souvent de trouver la cause de la lombalgie.

22) Il faut consulter un ostéo ou un chiro pour que le problème soit réglé rapidement

Celle-ci fait plutôt partie des idées reçues sur le rôle de chaque profession. Il se dit en général que l'action des kinésithérapeutes est plus lente que celle des ostéopathes et des chiropracteurs. Pourquoi ?

Il me semble que la différence principale réside dans les moyens utilisés. Les exercices, utilisés (par exemple) par les kinésithérapeutes, délivrent leurs meilleurs effets au moyen et au long terme. Les mobilisations et les manipulations, prisées par les ostéopathes et les chiropracteurs, délivrent l'essentiel de leurs bénéfices au court terme.

Si vous souffrez de fortes douleurs, le choix paraît facile. On recherche naturellement le soulagement le plus rapide possible. Le problème est que les manipulations n'offrent pas grand chose au delà d'un soulagement de court terme.

Vous êtes alors obligés d'y retourner régulièrement. Vous voilà bloqué(e) ! Idem pour les massages chez le kiné (pas de jaloux).

23) La douleur c'est dans la tête, vous êtes juste déprimé(e)

Combien d'entre vous se sont vus asséner le terrible : "La douleur est dans votre tête" ? Au delà du manque évident d'empathie, cela témoigne d'une profonde incompréhension.  

La douleur est effectivement influencée par nos pensées, nos souvenirs, nos émotions et le contexte. Pourtant cela ne veut pas dire que la douleur est imaginaire.

Pour mieux comprendre ce sujet délicat, voilà un article complet sur le sujet.

Vous pourriez également être intéressé par celui-ci sur le site du Huffington Post.

24) Vous avez mal à cause de tout ce que vous avez fait avant dans votre vie : vous êtes usé !

À vrai dire, cette phrase fait une belle transition vers la catégorie des idées reçues "impasses". Soyons clairs : de multiples antécédents de blessures et de douleurs peuvent favoriser les douleurs actuelles.

Cependant, le discours est habituellement plus vicieux. À cause des efforts précédents, il n'y aurait rien à faire. Le corps est alors vu comme une machine usée, prête à partir à la casse. Cette idée est vicieuse car elle vous dépossède de tout espoir de changement.

Par exemple, l'arthrose peut jouer un rôle dans certaines douleurs lombaires, mais elle peut aussi être tout à fait indolore. Vous pouvez lire cet article qui développe le rôle de l'arthrose dans le mal de dos.

C'est sans compter sur les étonnantes capacités d'adaptation de votre corps. Même s'il présente des signes d'usure,  vous restez capable de changement et d'adaptation. Cherchons des solutions dans le présent au lieu de rester fixés sur le passé.

Les idées reçues "impasses" sur le mal de dos

25) Lorsque vous avez mal au dos en faisant quelque chose, vous abîmez votre dos.

Que se passe-t-il dans votre dos lorsque vous ressentez de la douleur pendant un mouvement ? La question est vague, bien entendu, mais comment imaginez-vous ce qu'il se passe à l'intérieur ?

Instinctivement, vous pourriez vous dire qu'il s'y passe quelque chose de dangereux. Quelque chose qui se froisse, qui s'abîme, qui frotte, ou encore autre chose.

Les discours de certains professionnels de santé y participent : "Attention à vos mouvements, vous allez vous ruiner le dos !". Vous allumez votre télévision et vous tombez sur Michel Cymès qui vous explique que se pencher en avant est dangereux pour vos disques intervertébraux.

Vous pouvez apprendre davantage pourquoi vous avez une hernie discale en lisant cet article sur la cause des hernies discales lombaires.

Tout pousse à croire que la douleur signifie que l'on abîme son dos. Pourtant, la recherche scientifique montre depuis longtemps que ce n'est pas le cas.

En cas de douleurs chroniques, votre système nerveux crée de la douleur bien avant que la situation ne soit réellement dangereuse. Comme un airbag qui se déclencherait en passant un ralentisseur.

Une mère et sa fille essaient de toucher leur pieds, jambes tendues, un mouvement diabolisé par certaines idées reçues sur le mal de dos

26) Pour ne pas avoir mal au dos il faut se tenir droit autant que possible

Celle-ci est dédiée au médecin qui était passé dans deux émissions de Michel Cymes pour expliquer à tout le monde qu'il faut garder le dos droit en toutes circonstances.

Honnêtement, s'il suffisait de se tenir droit pour résoudre le problème du mal de dos, nous l'aurions résolu il y a bien longtemps. Malheureusement, c'est bien plus complexe que cela.

Mieux vaut alterner entre plusieurs postures plutôt que d'essayer de rester dans une posture rigide et fixe. Vous pourriez ressentir plus d'inconfort en essayant à tout prix de vous tenir droit.

Cela fait même partie des 10 techniques prouvées pour avoir mal au dos (je vous recommande chaudement la lecture de cet article).

27) Si la douleur augmente, il faut opérer

Les crises de douleur sont des périodes stressantes ! Est-ce que j'ai fait une erreur ? Est-ce que j'ai abîmé quelque chose ? Cette idée reçue consiste à penser que plus la douleur est intense, plus vous risquez de devoir vous faire opérer.

La décision d'une opération chirurgicale au niveau du dos se fait en fonction de beaucoup de critères. Au delà de l'intensité de la douleur, le type de douleur, la gravité du handicap, l'état de la colonne et l'expertise du chirurgien sont pris en compte.

Il s'agit d'une idée reçue assez effrayante, qui augmente votre anxiété et votre peur. Cela a tendance à son retour à majorer les douleurs, ce qui confirme qu'il y a un gros problème, etc. Le cercle vicieux est alors en place.

28) Je me sens mieux m'être fait craquer le dos, c'est bien que j'avais quelque chose de déplacé !

C'est un raisonnement que je retrouve fréquemment chez des personnes adeptes de thérapies manuelles, ou qui se font craquer le dos toutes seules. "Il me fait faire ce mouvement là (une rotation par exemple) et ça me remet en place la vertèbre. Après je suis tranquille pendant deux semaines."

Il est tentant de se dire que cela confirme qu'il y avait quelque chose à "replacer". Surtout si le soulagement est significatif. Pourtant, ce n'est pas aussi simple.

Les manipulations semblent procurer un soulagement notamment au court terme, en calmant temporairement le système nerveux et en relâchant les muscles autour de l'articulation.

Par exemple, c'est le cas pour les manipulations de l'articulation sacro-iliaque. Les techniques (analysées et expliquées dans cet article) peuvent soulager la région sacro-iliaque, sans pour autant avoir changé la position de l'articulation.

29) Si on voit une hernie à l'IRM, il faut forcément l'opérer pour qu'elle parte

"Hernie discale postéro-latérale et foraminale à l'étage L4-L5, arrivant au contact de la racine L5 gauche". La sentence tombe. Vous reposez votre compte-rendu et vous commencez à vous inquiéter.

Vous vous souvenez d'une connaissance qui a dû se faire opérer après avoir fait une hernie discale. Allez-vous devoir vous faire opérer également ?

En réalité, plusieurs choses sont à savoir. Le traitement d'une hernie discale sans critère de gravité (sans perte de force importante ni de syndrome de la queue de cheval) est avant tout conservateur. C'est-à-dire sans chirurgie.

La majorité des hernies discales se résorbe avec le temps. Vous souhaitez en savoir plus ? La série d'articles sur le sujet vous sera très utile, dont celui-ci : Quand faut-il opérer une hernie discale lombaire ?

30) Il faut faire attention à son dos le plus possible dans la journée

Cette idée reçue mérite sa place dans le panthéon des mythes sur le dos. Pourquoi ? Parce qu'elle est particulièrement vicieuse.

Dans notre société, faire attention à son dos paraît tout à fait naturel et sensé. Lorsque vous avez mal, ou lorsque l'on vous a diagnostiqué une hernie discale, les messages abondent dans ce sens. "Fais bien attention à comment tu te tiens et à comment tu bouges, pour ne pas aggraver ta hernie".

Ironie du sort, le fait d'être focalisé sur son dos en permanence a de nombreuses conséquences. Cela change la façon dont vous ressentez votre dos, votre façon de bouger, et bien plus encore. Au final, vous vous sentez pris au piège, et contraint de faire attention à vos moindres faits et gestes.

Pour comprendre pleinement pourquoi cet aspect est important, je vous conseille vivement la lecture de cet article : À quel point faut-il faire attention à son dos ?

31) Il ne faut pas se pencher en avant, mais plier les genoux

Nous terminons cette liste avec l'une des idées reçues les plus tenaces. Il faudrait éviter de se pencher en avant, et plier les genoux à la place. C'est l'équivalent du "tenez-vous droit", pendant les mouvements.

Pourquoi est-elle si coriace ? Parce qu'elle semble se confirmer pour beaucoup d'entre vous ! Vous avez mal en vous penchant en avant, donc vous évitez de faire cela, tout simplement.

Même si cela peut être douloureux, se pencher en avant n'est PAS un mouvement dangereux. Oui, même pour les disques intervertébraux. Vous souhaitez en savoir plus ? Découvrez cet article sur les mouvements à (ne pas) éviter.

Conclusion : quels sont les points communs entre toutes ces idées reçues sur le mal de dos ?

Je me demande combien vous en connaissiez (partagez cela en commentaire ci-dessous) ! Dans tous les cas, qu'avez-vous remarqué de récurrent parmi tous ces mythes ? Personnellement, voilà ce qui me frappe :

  • Ces idées reçues sont basées sur une compréhension simpliste et dépassée du mal de dos. Elles se basent souvent sur l'idée que la douleur serait due à un problème mécanique ou à un déséquilibre qu'il suffirait de corriger.
  • Ces mythes tendent à vous faire perdre confiance en votre corps et à vous inquiéter.
  • Ces idées reçues ont tendance à réduire l'éventail de vos possibilités. Il n'y aurait qu'un type d'exercice à faire ou qu'une façon de bouger, les choses se passent toujours de telle façon, etc.

Les articles et les vidéos sur Comprendre Son Dos visent exactement l'inverse : proposer une compréhension plus moderne et plus utile de la douleur et vous aider à élaborer votre propre stratégie de gestion du mal de dos. 

À bientôt !

Éric

Autres ressources

Le conseil de l'Ordre des kinésithérapeutes participe également à la lutte contre les idées reçues sur le mal de dos.

Catégories : Comprendre

7 commentaires

Gouraud Luc · 9 mars 2022 à 6:52 pm

PS : je constate aussi des hallux valgus chez des personnes n’ayant jamais porté de talons hauts (facteurs génétiques, héréditaires, hormonaux ??…)

Gouraud Luc · 9 mars 2022 à 6:50 pm

Merci Eric pour cet excellent article… comme à chaque fois !
Je suis d’accord avec tout. Je mettrais cependant 2 bémols :
J’explique aux patientes que je soigne que les talons hauts longtemps portés (sur la journée et sur des mois ou des années) risquent d’être facteur favorisant les hallux valgus, orteils en marteaux, cors … que l’on trouve si souvent chez les femmes âgées. Ce qui n’empêche nullement le port occasionnel, festif !
D’autre part, autant je crois que le dos est fait pour bouger dans toutes les directions, (sinon à quoi bon la nature aurait-elle prévue cette mobilité ?), autant je conseille la flexion des MI lors du port de charges lourdes (de l’ordre de plus de 10-15 kgs, ou soulever un enfant, etc…) pour éviter une pression discale trop élevée (cf Nachemson même si c’est peut-être dépassé ?) avec risque de déchirure discale, surtout si la personne doit soulever souvent, par ex dans un cadre pro (soignants, bâtiment, déménageurs…). Oui la hernie discale n’est pas un drame, et est très fréquente, mais si on peut conserver ces disques au top, c’est encore mieux !…
Voilà qq réflexions cher Eric. Je lis toujours votre prose avec grand intérêt et me réjouis de la diffusion de telles connaissances pour le grand public et les professionnels.
Cordialement
Luc

vercruysse · 2 mars 2022 à 7:01 pm

remerciement

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